Dans dix jours tous les regards vont se tourner vers l’agriculture .. à la porte de Versailles pour le salon de l’agriculture. C’est la grande fête annuelle qui mobilise responsables comme agriculteurs venus en masse des quatre coins de l’hexagone. Et pourtant moins de la moitié des agriculteurs ont voté aux élections des chambres d’agriculture fin janvier. Cela démontre leur défiance croissante vis à vis des institutions et même de leurs organisations, de leurs responsables autant que des élus. A cela s’ajoute un sentiment global de manque de reconnaissance par l’ensemble de la société, la dénonciation d’un « agribashing » injustifié.
L’agriculture française traverse un moment de doute et d’incertitude sur son avenir. Les écarts de performances entre les exploitations s’accroissent régulièrement. Cela est vrai dans toutes les productions et dans toutes les régions. Les moyennes ne veulent plus rien dire, certains agriculteurs sont désespérés alors que d’autres dégagent des revenus corrects , les résultats globaux n’étant pas, et de loin, catastrophiques.
Les récentes élections n’ont montré qu’une chose : tous les syndicats ont perdu beaucoup de voix à cause de l’augmentation de l’abstention alors que l’équilibre entre les différentes familles syndicales n’a quasiment pas bougé.
Les défis qui sont devant les agriculteurs, sont immenses : transition agro-écologique, révolution numérique, volatilité des cours, adaptation permanente à la demandes des consommateurs. Des réformes de la politique agricole sont en cours à Paris comme à Bruxelles. Les agriculteurs sont devenus très minoritaires dans nos sociétés pourtant ils sont les acteurs centraux de l’environnement, du paysage et du cadre de vie, de l’alimentation et de la santé. Les agricultrices et les agriculteurs sont donc, encore plus qu’hier, au cœur de beaucoup de préoccupation des français. Ceux-ci sont de plus en plus exigeants vis à vis d’une agriculture dont ils ignorent, pour la plupart, la réalité quotidienne.
Face à tous ces enjeux fondamentaux pour son avenir, il me semble de plus en plus crucial que le monde agricole, dans sa diversité, parle, d’une seule voix. S’Il existe différentes sensibilités syndicales, les positions sur les grandes questions d’avenir sont en fait, aujourd’hui, assez proches comme l’ont souligné les journalistes spécialisés tout autant que le ministre de l’agriculture lui-même durant la campagne électorale. Pour ma part j’ai déjà publié plusieurs tribunes dans ce sens.
L’agriculture française riche de sa diversité a un énorme potentiel. Elle doit s’appuyer sur ses propres ressources sans chercher de bouc émissaires ni rêver aux miracles et encore moins céder à la tentation du repli et de la fermeture.
Dans le respect de la pluralité syndicale qui est une force, peut-on imaginer que les responsables syndicaux agricoles, mettant de côté rancœur, invectives ou postures, se mettent autour d’une même table pour définir le socle minimal de ce qu’ils partagent comme vision du métier d’agriculteur pour 2030.
Cette voix unifiée porterait plus fort vis à vis des acteurs de l’agribashing.
Cette position commune renforcerait le monde agricole dans les négociations politiques en cours que ce soit sur la suite des Etats Généraux de l’Agriculture ou sur la future réforme de la PAC.
Cette union renforcerait le poids des agriculteurs dans la chaine alimentaire.
Cette vision de l’avenir contribuerait à redonner confiance aux agriculteurs français.